Gravures néolithiques : esthétisme ou symbolisme ?

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Guillaume Robin, Doctorant en archéologie, université de Nantes

Les motifs géométriques gravés sur les parois des tombes à couloir des Iles britanniques demeurent mystérieux. Toutefois, des récurrences graphiques laissent entrevoir certaines « règles » de composition et renforcent l’idée d’une fonction symbolique pour ces signes.

Les terres bordant la Mer d’Irlande comptent un nombre important de tombes à couloir gravées, actuellement datées du IVe millénaire avant J.-C. Ces monuments funéraires consistent en des tumuli circulaires recouvrant une structure interne : un couloir et une chambre, construits à l’aide de grandes dalles. Environ 600 dalles gravées ont été répertoriées dans une quarantaine de monuments, toutes portant des gravures issues d’un même répertoire géométrique.

Le contexte monumental de ces gravures peut être appréhendé en associant l’analyse graphique des motifs -les compositions- à l’étude chronologique – les évolutions des gravures et des architectures-. L’agencement singulier des gravures révèle en effet que plusieurs motifs, identiques ou de formes différentes, sont associés pour former des compositions spécifiques. Il peut s’agir d’un même motif gravé en série, ou de motifs différents disposés selon une configuration spatiale précise. Ainsi, deux dalles de l’enceinte des tombes de Newgrange et de Knowth portent une composition identique : des lignes de chevrons parallèles, placés au-dessus d’un losange, sont accolées à une spirale, elle-même située à gauche (Cf. illustration).

Par ailleurs, une étude de la position de ces motifs et de ces compositions permet d’identifier un système de construction symbolique au sein de ces monuments gravés. Des récurrences apparaissent dans le positionnement des motifs sur les pierres (des lignes ondulées sont souvent placées sur la tranche des dalles) et dans le positionnement des compositions à l’intérieur des monuments. Il semble ainsi que le choix des gravures ainsi que leur emplacement obéissent, au moins pour une partie des gravures, à un code précis.

Un langage ancestral ?

Il est intéressant de voir que certaines compositions spécifiques ont été gravées à des emplacements symboliques de l’architecture. Dans les tombes à couloir de Knowth 17 (Irlande) et de Barclodiad y Gawres (Galles), une même composition se retrouve sur la dalle marquant la jonction entre le couloir et la chambre. Cette composition, proche de celle décrite précédemment, consiste en un ou plusieurs losanges gravés au-dessous de plusieurs lignes de chevrons parallèles, eux-mêmes surmontés d’une spirale gravée sur la moitié droite du sommet de la dalle (illustration).

De nombreuses compositions laissent penser que ces gravures n’étaient pas de simples décors mais plutôt des symboles dont l’agencement avait une signification. Cependant, l’objectif n’est pas de retrouver cette signification ni d’interpréter le sens de chaque motif, tâches autant difficiles que périlleuses. Il s’agit surtout d’analyser les aspects formels de cet art pariétal, de mettre à jour la syntaxe de ce langage perdu sans en chercher la traduction. À partir d’une étude des gravures et de leur support, ce travail a pour objectif de caractériser les éléments symboliques des monuments et de mieux saisir un système de représentation qui demeure encore trop partiellement connu et reconnu.

Guillaume Robin, Doctorant en archéologie, université de Nantes

Guillaume Robin travaille au laboratoire de Préhistoire de l’Université de Nantes, UMR 6566 du CNRS (Civilisations atlantiques et archéosciences)

-  Robin, G., 2005 – Compositions et réemplois dans l’art mégalithique autour de la Mer d’Irlande (IVe millénaire avant J.-C.). Traverse (Revue interdisciplinaire de Sciences Humaines), 5, p. 111-126.

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